Preuve de l’existence d’une relation de concubinage apportée par un détective privé.

Preuve de l’existence d’une relation de concubinage apportée par un détective privé. n

 

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La Cour, 

Attendu que Christel X… épouse Y… est régulièrement appelante d’un jugement du 9 avril 2010 par lequel le Tribunal de Grande Instance de LYON a notamment :

– prononcé le divorce des époux Y…- X… à leurs torts partagés par application de l’article 242 du Code Civil,
– dit que les père et mère exerceront conjointement l’autorité parentale sur les enfants mineurs,
– fixé la résidence d’iceux au domicile de la mère,
– octroyé au père un droit de visite et d’hébergement d’usage,
– condamné Jens Y… à payer à Christel X…, pour sa contribution à l’entretien et à l’éducation des deux enfants communs une pension alimentaire mensuelle indexée de 650 € pour chacun d’eux, soit en tout 1 300 € par mois,
– condamné le même à lui payer la somme de 25 000 € à titre de prestation compensatoire,
– autorisé la femme à conserver l’usage du nom du mari après le prononcé du divorce ; 

Attendu, sur la demande principale en divorce du mari, que celui-ci reproche à son épouse d’avoir entretenu plusieurs relations adultères pendant le mariage ; 

Attendu que d’une première part, l’appelante a fait l’aveu à son mari, dans un courrier électronique qu’elle lui a adressé le 12 février 2008, de relations pour le moins injurieuses qu’elle a entretenues avec un homme prénommé Laurent rencontré lors d’un voyage au Niger en mars 2000, ce au temps de la vie commune, la séparation de fait des époux remontant au 9 juin 2004 et l’ordonnance de non-conciliation n’ayant été rendue que le 14 février 2006 ; qu’en dépit des contorsions de langage adoptées par l’appelante dans ses écritures pour tenter de dénier le sens pourtant fort clair de ce message où elle exprime tout le dépit que lui a causé le fait d’être quittée par ledit Laurent pour une autre femme, la Cour considère que Christel X… a, dans cette correspondance, clairement fait connaître à son mari qu’elle l’avait trompé avec cet homme dont les dénégations ne peuvent être prises en considération, l’établissement de relations intimes ayant existé entre l’appelante et lui-même étant contraire à ses propres intérêts ; qu’en tout état de cause l’attestation du sieur Laurent Z… n’est pas de nature à permettre d’écarter l’aveu exprès contenu dans le message électronique du 12 février 2008 et ne constitue manifestement qu’un ajustement de cause ; 

Attendu de deuxième part que l’appelante a entretenu des relations injurieuses avec le sieur Patrick A… au temps de la vie commune ainsi que cela ressort de l’aveu qu’elle en a également fait à son mari par message électronique du 3 septembre 2008 ; 

Attendu de troisième part que l’intimé verse aux débats une attestation établie par Patricia B…, ex-concubine d’un sieur Pierre-Jean C… et mère des enfants de ce dernier, laquelle expose par le détail comment elle a découvert la liaison entretenue par ledit sieur C… avec l’appelante et comment elle est allée jusqu’à rencontrer Christel X… pour s’expliquer avec elle sur les conséquences de cette relation sur la vie de sa famille, l’auteur de cette attestation joignant à celle-ci des courriers électroniques échangés, en août et septembre 2004, entre son concubin et l’appelante dans lesquels cette dernière évoque sans fard leurs relations sexuelles ; 

Attendu que la violation du devoir de fidélité entre époux reprochée à la femme par le mari est donc établie plus qu’à suffire ; 

Attendu, sur la demande reconventionnelle en divorce de la femme, que celle-ci reproche à son mari de multiples relations adultères et formule un catalogue aussi interminable qu’informe d’innombrables récriminations tenant tant aux relations des époux pendant le mariage qu’à leurs rapports de parents et à la conduite de la procédure ; 

Attendu, sur le grief d’adultère, que si l’appelante impute à son conjoint des relations adultères avec de très nombreuses femmes à l’époque de la vie commune sans rapporter aucune preuve de ces faits, elle établit néanmoins par la production de l’attestation très détaillée de la dame Sophie D… que dès le mois de décembre 2006, soit six mois après l’ordonnance de non-conciliation, l’intimé vivait en concubinage avec une femme du nom de E… (le passeport britannique de cette personne ne mentionne curieusement aucun prénom), une plaque au nom de celle-ci ayant d’ailleurs été apposée sur la boîte à lettres de son appartement ; que ce grief est donc parfaitement démontré, et que sans qu’il soit utile d’examiner les doléances que l’appelante formule sur les  » manipulations  » qu’elle prête à son mari relativement à la manière dont s’est développée la relation conjugale, à leurs relations avec leurs enfants ou à la conduite de la procédure de divorce, il échet de constater que sont établis à l’encontre de l’un et l’autre époux des faits constitutifs de violations graves et renouvelées des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ; que c’est par conséquent à bon droit que le premier juge a prononcé le divorce des époux Y…- X… à leurs torts partagés par application de l’article 242 du Code Civil et que la confirmation s’impose sur ce point ; 

Attendu, sur l’autorité parentale, que sans contester le caractère conjoint de celle-ci, l’appelante prie la Cour de dire qu’elle sera seule autorisée à prendre toute décision relative à l’orientation scolaire des enfants, au motif que l’attitude du père serait contraire à leur évolution satisfaisante dans le cursus éducatif ; 

Attendu que manifestement les choix éducatifs des parents divergent et que le conflit qui les oppose sur ce sujet comme sur de nombreux autres demeure aigu ; que néanmoins, l’appelante n’établit aucunement que son opinion doive prévaloir sur celle de l’intimé dont l’attachement qu’il porte à ses enfants et le dévouement qu’il leur témoigne sont comparables aux siens ; qu’il convient de relever que l’appelante a été victime de violences de la part de son fils aîné, et que dans de telles conditions, il ne paraît pas conforme à l’intérêt de cet enfant que Christel X… ne maîtrise pas, d’abandonner à l’appelante seule les choix éducatifs qui le concernent ; qu’en tout état de cause, l’autorité parentale ne peut faire l’objet de démembrements, et que le juge peut seulement autoriser des actes particuliers en cas d’opposition entre les parents lorsque l’intérêt de l’enfant l’exige ; que dès lors que l’autorité parentale est conjointe comme le prévoit la loi et comme les parties le demandent toutes deux, les prérogatives de l’un ou l’autre des parents ne sauraient souffrir quelque restriction que ce soit et qu’aucun d’eux ne saurait se voir privé de la possibilité de participer aux choix éducatifs concernant les enfants communs sans que l’autorité parentale dont il est investi soit vidée de toute substance ; que de ce chef également la confirmation s’impose ; 

Attendu, sur la contribution du père à l’entretien et à l’éducation des deux enfants communs aujourd’hui respectivement âgés de seize et treize ans, que l’appelante demande à la Cour de la fixer à la somme mensuelle de 900 € par enfant, soit en tout 1 800 € par mois, tandis que formant appel incident, l’intimé sollicite la réduction de cette contribution à la somme mensuelle de 350 € par enfant, soit en tout 700 € par mois ; 

Attendu que l’appelante percevait au début de l’année 2011 un salaire mensuel moyen net imposable de 2 887, 35 € ainsi que cela ressort du cumul annuel porté sur le bulletin de salaire du mois d’avril 2011 ; qu’elle a été licenciée à compter du 22 juillet 2011 et que ses ressources actuelles ne sont pas connues ; qu’elle fait état d’un budget mensuel comportant des dépenses de 5 558 € par mois et des recettes mensuelles de 4 579 € ; que la Cour est donc conduite à s’interroger sur la façon dont l’appelante gère son budget, étant observé que le poste des dépenses comporte un loyer de 1 735 € qui représente près des deux tiers du revenu qu’elle tire de son activité professionnelle ; qu’il est évident que si les dépenses excèdent de près de mille Euros par mois les recettes incluant les pensions alimentaires telles qu’elles ont été fixées dans le cadre de la procédure de divorce, il appartient à l’appelante d’assumer les conséquences de ses choix budgétaires ; qu’il convient de relever à cet égard, qu’au titre des revenus qu’elle a perçus en 2009, soit 24 229 € incluant 16 050 € de pensions alimentaires et seulement 8 179 € de revenus salariaux, elle a été déclarée non imposable compte tenu de la déduction des salaires versés pour l’emploi d’un salarié à domicile, soit 2 708 € 

Attendu qu’en octobre 2010, l’appelante percevait des allocations familiales pour 123, 92 € par mois mais qu’elle ne fournit aucun justificatif plus récent de ses droits ; 

Attendu que si les pièces versées aux débats par l’intimé démontrent que l’appelante entretient une liaison avec un homme, elles sont cependant insuffisantes à établir qu’existerait entre eux une communauté de vie impliquant un partage des charges courantes ; 

Attendu que l’intimé est gérant et associé unique d’une S. A. R. L. EUROMARKET CONSULT exerçant sous l’enseigne ELATOS ; qu’il a déclaré, au titre de l’année 2009, des revenus salariaux pour 58 200 € ainsi que des revenus fonciers pour 4 420 €, soit en tout 62 620 € représentant une moyenne mensuelle de 5 218, 33 € ; qu’il verse aux débats les comptes de la société EUROMARKET CONSULT pour l’exercice du 1er juillet 2008 au 30 juin 2009 mais qu’aucune mention n’indique sur ces documents qui les a établis et qu’en tout état de cause ils ne sont pas certifiés par un expert-comptable de sorte que la Cour ne saurait les prendre en considération ; 

Attendu que l’intimé occupe deux appartements sis à LYON dans le même immeuble et qu’il a acquis en 2007, en son nom propre pour l’un, et comme gérant d’une S. C. I. RENA dont il détient 99, 99 % des parts pour l’autre ; qu’il a souscrit à cet effet un emprunt personnel de 176 000 € remboursable par mensualités de 1 079, 86 € et, au nom de la S. C. I. RENA un emprunt de 183 400 € sur les modalités de remboursement duquel il ne fournit aucune précision ni aucun justificatif ; qu’en tout état de cause, les remboursements d’emprunts afférents à ces deux prêts représentent plus de 33 % de ses revenus déclarés ; qu’il échet d’ajouter que l’intimé a fait récemment l’acquisition d’une automobile de luxe dont la valeur peut être estimée à 50 000 € au minimum ; qu’il est démontré qu’il effectue de nombreux voyages dans des pays exotiques où il séjourne dans des hôtels de grand luxe ; 

Attendu que l’appelante rapporte la preuve de ce que l’intimé vit actuellement en concubinage avec une dame Meryl F…exerçant la profession d’architecte, ce au moyen du rapport établi par un détective privé le 26 mai 2011, soit le jour même de la clôture, et qui a fait l’objet ledit jour d’une communication dont la régularité n’est pas contestée ; 

Attendu par conséquent que l’intimé est censé partager par moitié avec une tierce personne les charges de la vie courante ; 

Attendu qu’il ressort de ce qui précède que l’une comme l’autre parties affichent un train de vie qui ne correspond pas à leurs ressources avouées ; 

Attendu, dans ces conditions, que la décision entreprise sera confirmée en ce qu’elle a fixé la pension alimentaire à la somme mensuelle de 650 € par enfant, soit en tout 1 300 € par mois, étant rappelé que la pension alimentaire a un caractère forfaitaire et que sauf situation particulière, le débiteur n’a pas à assumer, en sus, les frais de loisirs, paramédicaux ou de scolarité qu’il appartient au parent chez qui les enfants résident à titre principal d’engager et de régler en fonction du budget dont il dispose ; qu’ainsi, l’appelante sera déboutée de sa demande tendant à la condamnation du père à payer une multiplicité de frais annexes comprenant la scolarité dans une école privée, certes très réputée mais au coût extrêmement élevé, dès lors qu’elle a pris seule l’initiative de choix qui correspondent à un mode de vie qu’elle considère manifestement comme un acquis auquel aucune circonstance ne pourrait la contraindre à renoncer ; 

Attendu, sur la prestation compensatoire, que le mariage, contracté en Allemagne sous le régime de la séparation de biens, a duré dix-neuf ans dont quelque douze ans de vie commune et que deux enfants encore mineurs en sont issus ; que les époux sont respectivement âgés de quarante-cinq ans pour le mari et de quarante-deux ans pour la femme ; 

Attendu que la situation actuelle des parties a été décrite supra ; 

Attendu qu’il n’y a toutefois pas lieu de tenir compte, pour apprécier les conditions de vie de l’appelante, des allocations familiales dont elle bénéficie, ces prestations étant exclusivement destinées aux enfants ; 

Attendu qu’il ressort du dossier et des débats que l’appelante a, pendant plusieurs années, cessé ou ralenti l’activité professionnelle qu’elle pouvait exercer compte tenu de ses études dans une école supérieure de commerce, ce afin de se consacrer à son foyer et à l’éducation des enfants ; qu’en tout état de cause, l’intimé ne démontre pas que c’est contre sa volonté que son épouse a ainsi suspendu ou ralenti son activité professionnelle, que ce soit au début du mariage lorsque les époux résidaient en Allemagne ou depuis qu’ils sont venus s’installer à LYON en 2001 ; 

Attendu que l’appelante a créé, à LYON, une société dont l’objet commercial était le  » management  » et le  » coaching  » suivant le vocabulaire à la mode employé dans ce milieu professionnel ; que les excellents conseils que cette société était censée dispenser moyennant finance aux autres entrepreneurs ne l’ont pas empêchée d’être déclarée en liquidation judiciaire ; qu’il n’appartient pas à la Cour, dans le cadre de la présente instance, d’analyser les raisons qui ont conduit cette société à l’échec et que les pages de conclusions consacrées par les parties à ce sujet sont donc sans aucun intérêt ; 

Attendu, quoi qu’il en soit, que pendant plusieurs années l’appelante n’a pas cotisé ou n’a que faiblement cotisé à l’assurance vieillesse, ce dont elle subira inéluctablement les conséquences lorsqu’elle devra faire valoir ses droits à la retraite ; 

Attendu, certes, qu’elle est encore jeune, mais qu’il convient de tenir compte du fait qu’elle est atteinte d’une maladie génétique qualifiée de  » maladie orpheline « , révélée depuis quelques années seulement et qui a nécessité récemment une intervention chirurgicale importante ; que cette maladie qui comporte des phases de rémission prolongées alternant avec des périodes de crise aiguës aura inévitablement des répercussions sur la poursuite de son activité professionnelle malgré le suivi médical très attentif dont elle fait l’objet, les traitements actuellement connus n’ayant pour effet que d’en retarder la progression ; 

Attendu qu’il convient de prendre en considération le fait que le père devra, pendant de nombreuses années encore, régler des pensions alimentaires pour les deux enfants communs dont la mère assume la charge matérielle au quotidien excepté pendant les périodes réservées au droit de visite et d’hébergement du père ; 

Attendu que les époux, mariés sous le régime de la séparation de biens, ne possèdent aucun immeuble indivis ; 

Attendu qu’il ressort de ce qui précède que la rupture du mariage crée, au détriment de la femme, une disparité dans les conditions de vie respectives des époux et que c’est par conséquent à bon droit que le premier juge a reconnu, en faveur de l’appelante, le bénéfice d’une prestation compensatoire ; que sur le montant de ladite prestation compensatoire, celui-ci tel qu’il a été fixé par le juge du premier degré, paraît quelque peu insuffisant compte tenu des éléments examinés supra en écartant l’aspect polémique donné par les parties à leurs écritures ; 

Attendu qu’il échet en conséquence de réformer de ce chef et de condamner l’intimé à payer à l’appelante la somme de 50 000 € à titre de prestation compensatoire ; 

Attendu, sur la demande de dommages et intérêts présentée par l’appelante que celle-ci n’en précise pas le fondement juridique tout en indiquant dans ses écritures d’appel que son préjudice diffère de celui causé par la rupture du mariage ; 

Attendu que la Cour ne peut donc que constater que cette demande est entièrement nouvelle pour n’avoir jamais été présentée au juge de première instance puisque le jugement dont appel n’en fait aucunement mention ; que dès lors, la Cour doit, d’office, déclarer cette demande irrecevable comme l’article 564 du Code de Procédure Civile lui en fait l’obligation ; 

Attendu, sur la demande de désignation d’un notaire chargé de liquider le régime matrimonial présentée par l’intimé, qu’il appartiendra sur ce point aux parties de se conformer aux dispositions des articles 1136-1 et suivants du Code de Procédure Civile ; que cette demande sera par conséquent rejetée ; 

PAR CES MOTIFS : 

Statuant publiquement, contradictoirement, après débats en chambre du conseil et après en avoir délibéré conformément à la loi, 

En la forme, déclare recevables tant l’appel principal que l’appel incident ; 

Au fond, dit le premier seul et partiellement justifié ; 

Réformant, condamne Jens Y… à payer à Christel X… la somme de 50 000 € en capital à titre de prestation compensatoire ; 

Confirme pour le surplus le jugement déféré ; 

Déclare Christel X… irrecevable en sa demande de dommages et intérêts ; 

Déboute les parties de toutes autres demandes, fins ou conclusions plus amples ou contraires ; 

Condamne Jens Y… aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile, par ceux des mandataires qui en ont fait la demande. 

Le Greffier, Le Président.

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Source Legifrance

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